dimanche 23 mai 2010

La Chine : communiste ?

Je termine un voyage en Chine que j’ai retrouvée après 29 ans. Quelle transformation ! Rien n’est plus pareil sauf la mainmise du parti communiste chinois sur le gouvernement qui perdure. Hôtels des plus modernes, aéroports fantastiques, autoroutes de grande qualité, tours de logements en quantité incomptable, villes avec plan d’urbanisme d’avant-garde, usines de toutes sortes, entreprises privées partout, boutiques de toutes gammes, etc… tout est là. La qualité de vie des Chinois s’est améliorée du tout au tout et continue à progresser rapidement. Ce grand pays, le plus peuplé du monde, change à un rythme inimaginable et deviendra vite le plus important de la planète.

Aujourd’hui, la loi du marché gouverne la vie de tous les jours. Les commerces et les entreprises sont privés et la compétition est forte.

Pour acheter une auto, le Chinois peut marchander car presque toutes les marques connues sont disponibles et les prix sont à la baisse. De même pour tout autre produit. C’est comme au Canada sauf que les prix sont beaucoup moins élevés.

Les maisons et les logements sont généralement des propriétés privées et les propriétaires ne peuvent être forcés à déménager sauf pour des projets qui sont d’intérêt général comme le passage d’une autoroute. Et dans un tel cas, l’exproprié est bien compensé. S’il veut acheter un nouveau logement, les banques sont là pour lui prêter jusqu’à 80% de sa valeur sur une très longue période.

Les constructeurs de tours à logements sont privés et louent le terrain du gouvernement pour 70 ans (toute la terre chinoise est propriété de la Chine sauf quelques exceptions) et y érigent d’importants bâtiments en hauteur. Ils doivent trouver preneurs pour réussir. Le gouvernement construit aussi des tours pour les personnes à faible revenu.

L’école primaire n’est pas gratuite. Si elle se trouve dans son quartier, le Chinois paye un léger montant annuel pour son enfant et le gouvernement prend charge de la différence. Les livres, les repas et le transport sont à la charge des parents. S’il recherche une meilleure école pour son enfant et l’enrôle dans une école d’un autre quartier, le montant est alors fort important. Le collège et l’université sont également coûteux pour le Chinois moyen.

Les soins de santé ne sont pas gratuits car il y a une prime à payer pour voir le médecin et se faire soigner, même pour les nombreux avortements nécessaires pour obéir à la loi d’« un seul enfant par famille ». Sinon, une forte amende leur est imposée.

Si un Chinois a du talent, de l’énergie, le goût du risque et veut travailler, il bénéficie des fruits de son labeur. Il est libre de gagner sa vie à sa façon et a la rémunération en conséquence. Il n’est plus question d’égalité des salaires en Chine. Seul Cuba et la Corée du Nord obligent encore leurs citoyens à accepter ce système rétrograde.

De toute évidence, le système économique de la Chine est aujourd’hui capitaliste. On retrouve chez les citoyens de ce pays la même motivation et volonté de réussir que chez nous. On peut voir clairement leurs efforts individuels qui sont axés sur une bonne performance, l’efficacité, le rendement et le travail bien accompli. Le Chinois veut satisfaire son employeur ou son client. Il a besoin de gagner, de progresser et il agit en conséquence.

Seul le parti communiste ne suit pas. Il a permis, certes, le développement incroyable que connaît la Chine et qui est en train d’en faire le plus important pays de la planète. Malheureusement le gouvernement chinois continue à maîtriser tout ce que lit, entend et voit le Chinois. Même s’il y a plus de 70 chaînes de télé disponibles, aucune ne donne des nouvelles politiques venant d’autres pays du monde, ni ne retransmet les opinions émises sur l’évolution de la vie politique de la planète.

L’internet est contrôlé par l’État. Les réseaux du genre Facebook, les sites de blogs comme Blogspot et plusieurs autres sont éliminés du réseau. Les chefs chinois craignent que les jeunes, entre autres, s’abreuvent d’idées différentes de celles qu’ils propagent. Ils veulent éviter une révolte comme celle des jeunes des pays de l’Europe de l’Est en 1989. Ces derniers avaient compris, grâce à la télévision qui traversait le rideau de fer, que leur qualité de vie était minable, sans liberté et que leur futur était compromis et sans promesse par rapport à celui des jeunes de l’Ouest. Malgré que les jeunes Chinois aient actuellement une qualité de vie de beaucoup supérieure à celle des jeunes des ex-pays communistes sous le joug de l’URSS, l’internet libre peut créer des remous similaires en Chine et qui sait ce qu’ils peuvent générer. Le parti communiste ne joue pas avec le feu !

Seuls, 13% des Chinois sont membres du parti communiste. Ils sont les privilégiés de la société et ont des avantages, comme le logement, que d’autres n’ont pas. Les gouvernements municipaux, provinciaux et national sont sous le contrôle du parti. Il y a plusieurs élus aux différents congrès politiques qui ne sont pas communistes mais la majorité l’est et le système établi assure que le parti communiste ne sera jamais minoritaire.

Le parti contrôle le parlement, l’armée, les banques, les transports, etc… Il exerce une autorité totale. Il est le dictateur du pays. Il se dit efficace. Par exemple, dans le cas de la réalisation du barrage hydraulique des Trois-Gorges, le plus gros du monde et construit en un temps record, il a fait fi des contestations et des critiques que le projet a générées. Sous prétexte que le pays avait un grand besoin des mégawatts à être produits, le parti communiste l’a imposé. Ce faisant, il l’a fait au détriment d’autres solutions comme le nucléaire qui aurait permis d’éviter l’inondation à tout jamais de l’immense superficie de terres occupées par plus d’un million de personnes, la relocalisation forcée de celles-ci et la conservation des villes et villages millénaires avec les trésors historiques qu’ils contenaient.

Un tel régime est-il nécessaire au moment où la Chine sort du passé qui l’a détruite ? Un gouvernement sans opposition parlementaire, ou de la rue, est-il plus efficace qu’un gouvernement d’élus qui cherchent à plaire à leurs commettants pour se faire réélire au lieu de prendre les grandes décisions dans l’intérêt de la nation ? Le problème, c’est qu’en Chine on ne peut en discuter ou poser la question car le parti communiste refuse de tels débats.

Les Chinois ne sont plus communistes. Ils démontrent aujourd’hui qu’ils sont capitalistes et qu’ils aiment l’être. Leur gouvernement se dit communiste mais n’applique plus les notions de Karl Marx ni ne respecte les citations de Mao Tsé Toung. Par contre, on peut difficilement affirmer que le gouvernement actuel n’a pas bien agi. Il a quand même compris que c’est par la liberté économique de l’individu que la Chine peut vraiment se développer et a présidé à l’importante transformation du pays dont nous sommes tous témoins. Le temps est-il venu pour le parti communiste chinois de se faire harakiri, de se transformer et de démocratiser le système politique de son pays ? C’est la question que je me pose.

Claude Dupras

samedi 22 mai 2010

Le pavillon du Canada à l’expo2010 : un flop

À l’exposition internationale et universelle de Séville en 1992, le pavillon du Canada fut un très grand succès populaire. Les files d’attente pour y entrer étaient interminables et il fallait s’armer d’une patience à toute épreuve pour finalement le visiter et voir, entre autres, son fameux film en IMAX sur le Canada montrant, avec des images et des scènes inoubliables, ses peuples, sa nature, ses richesses et son potentiel extraordinaire. Les visiteurs en ressortaient avec le « goût du Canada ».

Arrivé le 10 mai à l’expo 2010, je me suis empressé de visiter le pavillon de mon pays, le Canada. Le bâtiment est imposant, géant et un des plus gros en volume. Sa forme est bizarre, variable, changeante et étendue à l’horizontale telle un ver de terre. C’est comme un grand « C » imparfait qu’on ne peut détecter que si on le regarde en plan. Ses arêtes vives, montantes et descendantes, suivent des angles incohérents qui ont rapport probablement avec l’activité intérieure du pavillon. Sans fenêtre ni vitrine, le pavillon est totalement couvert de tôles réfléchissantes et surtout de lattes de bois installées de façon à mettre en valeur sa forme changeante. La réalisation totale du projet a été confiée au Cirque du Soleil incluant le contenu.

La filée d’entrée exigeait une attente de 30 minutes. Le Canada attise donc la curiosité des Chinois, ce qui donne au pavillon la possibilité de devenir un attrait important de cette grande exposition. Malheureusement, ce ne sera pas le cas, car on en sort fort désappointé. On ne découvre presque rien dans ce grand bâtiment et ce qu’on y trouve n’est pas à la hauteur d’un pays spectaculaire, riche, attrayant et important comme le nôtre. Le bouche-à-bouche va le miner.

Mon sentiment fut confirmé par mon épouse qui ressentit la même chose que moi. Une heure plus tard, nous étions au pavillon du Mexique où nous avons rencontré, par hasard, six Québécois qui, comme nous, attendaient pour y entrer. Ils venaient tout juste de visiter le pavillon canadien et j’en ai profité pour faire ma petite enquête. La réaction était unanime : « pas fort ! ». Le lendemain, quelques Espagnols nous confirmèrent la même chose.

Le thème du pavillon veut respecter celui de l’Expo 2010 «meilleure ville, meilleure vie ». On peut à peine l’imaginer en visitant notre pavillon. Entrant comme dans un goulot de bouteille aux parois couvertes d’écrits difficilement lisibles à cause de l’étroitesse de l’entrée et du passage précipité des visiteurs vers la pièce suivante, qui est la principale, et où on a l’impression d’être dans une caverne au plafond fluo. Le seul message que nous y percevions était en rapport avec la vélocité qui était représentée par quelques vélos sur socle (à peine une douzaine). Seuls quelques visiteurs sur les centaines qui passaient pouvaient enfourcher ces bicyclettes et pédaler devant un écran arqué représentant des routes, des paysages ou encore des personnages de bandes dessinées. La deuxième pièce, complètement dans le noir, avait un plancher incliné vers un écran de 180 degrés sur lequel défilaient en boucle des images superposées, floues en partie, avec des scènes de vie urbaine pêle-mêle accompagnées de bruits de fond de ville. On voyait à peine où marcher et où se placer pour voir ce mélimélo d’images.

C’est tout !

Il ne restait plus qu’à passer à travers une mini boutique où on vendait des petites bouteilles de sirop d’érable, des toutous en peluche représentant des oursons, des oiseaux, des polices montées, des chats avec la feuille d’érable rouge. Le tout « made in China », les mêmes bricoles que l’on retrouve dans les giftshops bon marché pour touristes à Montréal. Pas d’artisanat canadien (sauf une dizaine de petites sculptures Inuit à prix très élevés), aucune littérature sur le Canada, pas de carte postale, photos-souvenirs. A l’extérieur, il y a un restaurant-terrasse qui n’a rien à voir avec ceux de la rue St-Denis.

Dans la cour intérieure, on annonçait la « Cour Bombardier ». Malheureusement on n’y retrouvait que des débris de construction car les ouvriers y travaillent encore. D’ailleurs, c’est la seule place à l’expo où nous avons vu des travaux inachevés.

Cette exposition de ce qu’est le Canada n’est pas à la hauteur de notre pays, ni à celle du Cirque du Soleil. Cela démontre encore une fois que « chacun son métier, et les vaches seront bien gardées ».

Le lendemain, après avoir visité les pavillons français, allemand, américain, belge et espagnol, j’ai compris que notre pavillon canadien n’est pas un flop, mais un super flop.

Claude Dupras

jeudi 6 mai 2010

Le Sud-Coréen et son pays

En route pour Shanghai et son exposition universelle, je fais un arrêt à Séoul, capitale de la Corée du sud.

C’est la ville des olympiades de 1968, du Mondial 2002, de Samsung, d’Hyundai et de LG. Vingt millions d’habitants avec sa grande banlieue dans un pays de quarante huit millions.

Après avoir été longtemps une colonie du Japon, la Corée devient enfin indépendante en 1945. Malheureusement, elle se retrouve en 1950 dans une guerre fratricide lorsque les Coréens communistes du nord, motivés par leur alliance avec l’URSS et leurs liens à la Chine de Mao décident d’envahir tout le pays. Les Coréens du sud, sympathiques à l’Occident, sont repoussés et Séoul est capturée et détruite. Le célèbre général MacArthur, responsable de toutes les opérations américaines et alliées du Pacifique veut utiliser la bombe atomique pour reprendre tout le pays. Mais la Maison-Blanche de Truman, qui a déjà accepté de lancer la bombe A sur Hiroshima et Nagasaki, pour mettre fin au conflit mondial, voit plus loin que son fameux général et refuse. Frustré, MacArthur poursuit la bataille terrestre plus au nord à l’encontre des ordres du président. Truman le remplace et le général quitte avec fracas.

En 1953, le nouveau président Eisenhower négocie la paix. Le Canada qui a participé activement à cette guerre y a perdu plusieurs de ses braves et voit des milliers d’autres revenir au pays, blessés et marqués. La ligne est fixée au 38ième parallèle. La guerre prend fin. Encore aujourd’hui, la Corée demeure le seul pays coupé en deux. La Corée du sud est démocratique, celle du nord totalitaire.

Les Sud-Coréens d’aujourd’hui reconnaissent les sacrifices, le courage et les efforts qu’ont fait leurs grands-parents pour gagner la guerre contre le nord. Ils sont impressionnés par l’ardent travail de leurs parents pour reconstruire leur pays. Ils sont fiers de constater que ce dernier est à l’avant-garde dans un très grand nombre de domaines techniques et scientifiques. Ils veulent faire mieux que leurs prédécesseurs. Leur motivation surprend et même s’ils sont heureux, ils demeurent pressés, ambitieux et impatients d’améliorer leur sort. Ils sont admirables.

Ici, on travaille, on aime travailler. Les vacances se répartissent en deux semaines. Une en été et l’autre en hiver. Plus 13 jours fériés (dont celui d’hier « la journée des enfants » où tout est fermé afin que les parents fêtent avec eux). Pas plus. Les salaires sont bons. Les Sud-Coréens arrivent à leur lieu de travail avant l’heure, plusieurs trente minutes avant. Pour faire du bon travail, certes, mais aussi pour protéger leur emploi. Ils sont respectueux des autres, pleins de sourires, de courtoisie et chaleureux. Peu parlent une autre langue que le coréen, mais ils n’hésitent pas à aider (j’ai fait un retour en métro et ce fut toute une découverte). Ils sont habillés proprement, surtout en noir et blanc, et portent presque tous, des souliers parfaitement cirés, cela inclus même les préposés au nettoyage des rues. Des kiosques sont fournis par la ville où on offre des services de « frotteurs de bottes » et de cordonniers. Ici, on entre au bureau, à la maison ou au restaurant en se déchaussant et en laissant ses souliers dans des cases à la porte.

La ville est immaculée, propre, fleurie, ordonnée. Il y a peu de MacDos (j’en ai vu deux) et de fastfood américains. Le transport public est roi. Le métro a 367 stations, les innombrables autobus de toutes couleurs circulent rapidement sur leur voie, les taxis de modèles récents sont d’une propreté remarquable, peu coûteux et leur conducteurs ont des airs de chauffeurs de limousines. Mais, et il y a toujours un mais, le trafic est très, très intense malgré les nombreuses voies élevées bien intégrées dans la trame urbaine. Non seulement en ville mais aussi vers les banlieues. On ne peut, en fait, certifier la durée d’un trajet.

L’innovation est aujourd’hui la marque des entreprises coréennes. Au début, après la guerre, les industriels coréens imitèrent le Japon et copièrent les produits américains et européens. Ils les vendaient, en Occident et ailleurs, à bas prix car leur main d’œuvre était peu chère et la fabrication de mauvaise qualité.

Depuis, les Sud-Coréens ont réalisé qu’ils avaient la capacité et l’intelligence pour fabriquer des produits haute gamme. Ils ont envahi le domaine de l’électronique et sont devenus le numéro un du monde dans plusieurs secteurs, dont celui de la télévision. Dans le secteur automobile, ils prennent de plus en plus de place avec des véhicules de meilleure qualité. Ils fabriquent aussi des autobus, des camions, des pneus et des équipements lourds qui se vendent très bien et qui sont de plus en plus recherchés dans le monde. Ils usinent des armements militaires aussi en grande demande. Ils fabriquent des navires commerciaux, militaires et de croisière. Dans le génie de la construction, ils sont parmi les tops 5 et obtiennent des mandats importants au dépend des plus grandes firmes mondiales. Dans l’énergie nucléaire, ils viennent de surpasser la France pour la fourniture de deux usines aux Émirats Arabes Unis. Ils proposent aussi le design et la construction de trains à grande vitesse (ils en ont un en opération), et ainsi de suite….

La Corée du sud est sur un élan fantastique. Nous n’avons pas fini d’en entendre parler. Malgré la crainte constante d’une nouvelle guerre pouvant venir du nord, ses jeunes ont faim de réussite et leur préparation est à la hauteur de leurs ambitions.

Ah ! que j’aimerais voir au Québec ce que j’ai constaté ici. Ce n’est pas l’intelligence qui manque chez nous, mais le goût du travail et de la compétition.

Claude Dupras